Le credo du chien guide

Isis, chien guide de Michel Rosart

Je suis un chien, rien qu'un chien, fait comme tous les chiens, mais je suis un chien heureux. Je vis avec mon maître, je vis pour mon maître. En me voyant, harnaché de cuir, tourner la tête de tous les côtés pour déceler le possible danger, ne dites pas "pauvre chien" !

Je sais guider mon maître, on me l'a appris. C'est mon métier, comme vous avez le vôtre. Je ne m'ocupe pas de ce que vous faites, alors laissez-moi à mes affaires : ne me parlez pas, ne me caresser pas, surtout ne me touchez pas. Vous pourriez me distraire.

Je ne suis pas un chien méchant, tout le monde vous le dira, cependant je suis responsable de mon maître, totalement et à tout instant. Alors, s'il vous plaït, ne levez pas la main sur lui, même pour faire semblant et attendez qu'il vous u autorise pour prendre son bras.

Lui et moi consitutons une équpe, je suis son oeil aux genoux, il est mon chien-meneur. Nous allons notre chemin, tantôt à bonne allure, tantôt plus lentement. Je ne sais pas lire, il ne peut pas lire, je ne sais pas bien distinguer les couleurs, il ne voit pas les couleurs, je ne sais pas parler, il sait s'exprimer. Si nous sommes perdus, il demandera son chemin !

Laissez mon maître me commander comme il l'entend. N'intervenez - en paroles seulement, surtout ne prenez pas ma laisse ! - que si vous nous voyez égarés, désemparés, incapables de nous sortir seuls d'une embûche. Ce sera exceptionnel, mais je ne suis qu'un chien et, parfois, on me demande beaucoup.

S'il arrivait que je commette une erreur - et ça m'arrive - mon maître est le seul juge de la sanction à m'appliquer. Ne me plaignez pas, je ne suis pas à plaindre. Spyez sans crainte aucune, il ne me frappera pas.

Vous qui composez la foule dans la rue, si vous m'apercevez avec mon maître, songez combien il est difficile d'éviter à la fois les passants, les parcmètres, les véhicules stationnés n'importe où, les objets qui encombrent le passage, tout cela sans descendre du trottoir. Soyez gentil, laissez-nous un peu de place et pardonnez-moi si, l'espace étant trop restreint pour nous deux, mon maître vous a heurté.

Comme tous les chiens j'aime les bonnes choses, je vous en prie, ne me tentez pas en m'offrant à manger, cela me ferait oublier mon travail. Quelques secondes d'inattention et mon maître, peut-êre, va tomber. Il m'en fera le reproche, car il ne saura même pas que vous existez !

Je n'ai pas peur des autres chiens : quand l'un deux vient tourner autour de moi, je le regarde et j'en oublie ma route. Si vous êtes le maître de ce chien-là, éloignez-le, nous vous en serons reconnaissants.

J'ai mes moments de liberté, quand mon maître n'a plus besoin de moi. Alors je redeviens un chien comme les autres. J'apprécie les petites attentions des enfants, celles des adultes aussi. On peut être chien guide et rester affectueux ! On joue ? Volontiers ...

Ah, mon maître m'appelle ... Excusez-moi, ce sera pour une autre fois. Le service avant tout.

Jacques LANNIER